Auparavant axée sur les produits financiers, la stratégie du fonds de pension inclut dorénavant des prises de participation dans de grands groupes privés.

À Abidjan, nombreux sont les projets en recherche de financement qui aimeraient trouver une place sur le bureau de Charles Kouassi. En quelques années, le directeur de la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS) a fait du fonds de pension des travailleurs du secteur privé l’un des investisseurs phares de la capitale économique ivoirienne. À son initiative, la CNPS a calqué sa stratégie sur le puissant fonds de pension de retraite sud-africain Public Investment Corporation (PIC).

« Par le passé, notre stratégie était axée sur les dépôts à terme (DAT). Nous l’avons réorientée en décidant de faire fructifier les fonds dans les investissements », a confié Charles Kouassi, le directeur général de CNPS, qui en trente ans a gravi tous les échelons du fonds de pension.

Multiplier les financements

Comme PIC, CNPS a pris des participations dans plusieurs entreprises comme celles qu’il détient dans Eranove depuis juin 2017. Il est aussi au capital des filiales ivoiriennes de Société générale et d’Attijariwafa Bank, du Seen Hotel Abidjan, propriété du groupe Teylium, et a injecté son argent dans les fonds des sociétés d’investissement Amethis, Yelen et Afric Invest.

Cette politique ambitieuse d’investissements a pu voir le jour grâce aux réformes engagées par le gouvernement en 2012

La dernière transaction de CNPS est l’entrée, en novembre 2017, dans le tour de table du projet de construction de l’hôtel Mövenpick de 160 chambres à Abidjan, estimé à 38 milliards de F CFA (58 millions d’euros).

Secteur en pleine croissance

Dans cette opération, l’institution dirigée par Charles Kouassi est le deuxième plus gros actionnaire. En septembre 2017, CNPS avait pris des parts dans le capital d’Ecobank Côte d’Ivoire, lors d’une offre publique de ventes d’actions nouvelles, suivie d’une introduction en Bourse. Le fonds est désormais au conseil d’administration de la banque.

Cette politique ambitieuse d’investissements a pu voir le jour grâce aux réformes engagées par le gouvernement en 2012, repoussant l’âge de la retraite de 55 à 60 ans et augmentant les cotisations de 8 % à 14 % du montant des salaires. Depuis 2013, CNPS voit ses excédents croître d’année en année. En 2018, ils devraient atteindre 118 milliards de F CFA.

Objectif : 10 millions d’assurés

En parallèle de ces prises de participation, le fonds de pension consacre chaque année une enveloppe de 30 milliards de F CFA aux achats de produits du Trésor public ivoirien tels les bons et les obligations. En 2017, son patrimoine monétaire financier était de 300 milliards de F CFA, et l’objectif est d’atteindre 500 milliards en 2020 et 1 000 milliards à l’horizon 2023.

Pour y parvenir, CNPS entrevoit une autre réforme qui permettra d’intégrer les travailleurs indépendants, estimés à 8 millions de personnes, pour passer de 700 000 à 10 millions d’assurés.

À l’affut de nouveaux projets

En attendant, le fonds a lancé une vaste opération immobilière dans le quartier résidentiel d’Angré, dans la commune de Cocody, où sont en cours de construction 32 immeubles de cinq étages chacun, soit 384 appartements. Insatiable, CNPS n’entend pas en rester là et est déjà à l’affût de nouvelles opportunités d’investissements.

Sur le bureau de Charles Kouassi, les piles de projets à financer ne sont pas près de disparaître.

Les militaires choisissent le secteur de la santé

Avec 2 milliards de FCFA (3 millions d’euros) de cotisation par an, le Fonds de prévoyance militaire (FPM) est loin de la force de frappe du CNPS.

Il entend néanmoins poursuivre ses investissements dans l’immobilier. Après l’hôtel Palm Club d’Abidjan réalisé pour un coût de 11,2 milliards de FCFA, le FPM souhaite construire un hôpital mutualiste de 100 lits et créer une société financière d’épargne et de crédit.

Son patron, le colonel-major de gendarmerie Konan Kouamé, mise aussi sur la gestion et l’exploitation des quatre futurs hôpitaux militaires que va construire le gouvernement grâce à un financement indien de plus de 41 milliards de FCFA.